Nous avons besoin de réensauvager l’internet, plaident Maria Farrell et Robin Berjon dans Noema, qui filent la métaphore de la perte de diversité du net avec la perte de diversité environnementale. « Lorsque nous simplifions des systèmes complexes, nous les détruisons ». « Nos espaces en ligne ne sont pas des écosystèmes, ce sont des plantations : des environnements hautement concentrés et contrôlés, plus proche de l’agriculture industrielle des élevages de poulets en batterie qui rendent folles les créatures piégées à l’intérieur ». « Le confinement des infrastructures et l’imposition d’une monoculture technologique (par les grands acteurs du net) nous excluent de notre propre avenir ». La consolidation à l’oeuvre n’élimine pas seulement la concurrence, elle réduit les relations possibles, expliquent-ils. Nous devrions envisager internet comme un écosystème endommagé et en difficulté, menacé de destruction expliquent Farrell et Berjon. « Nous n’avons pas besoin de réparer l’infrastructure d’Internet. Nous devons le réensauvager. »
« Revitaliser Internet est plus qu’une métaphore. C’est un cadre et un plan. Cela nous donne un regard neuf sur le problème épineux de l’extraction et du contrôle, ainsi que de nouveaux moyens et alliés pour le résoudre… » Mettre fin aux monopoles de l’Internet n’est pas seulement un problème intellectuel : c’est une question émotionnelle. « Les écologistes savent aussi que la complexité n’est pas l’ennemi, c’est le but. »
Pour favoriser le retour à un internet plus divers, les deux auteurs suggèrent de commencer par limiter la concentration et redynamiser les législations anti-trusts… mais également proposent de nationaliser les infrastructures, d’obliger les fournisseurs de services à la transparence… « Nous devons cesser de considérer l’infrastructure Internet comme trop difficile à réparer », concluent-ils.
Si le discours est percutant, les solutions évoquées, elles, seront certainement plus difficiles à imposer.