Arthur Mensch, PDG de Mistral, interviewé au journal télévisé de France 2 expliquait que s’il fallait plus de justice fiscale, celle-ci ne pouvait pas passer par la taxe Zucman qui propose de taxer les très hauts patrimoines (lire la synthèse de son intervention sur BFM). Sur Linked-in, l’économiste Gabriel Zucman lui répond et explique à quoi ressemblerait la taxe Zucman appliquée à Mistral.
« Vous possédez environ 10 % de Mistral AI qui vaut environ 10 milliards d’euros, votre fortune est donc de l’ordre de 1 milliard. Avec l’impôt plancher que je propose vous auriez à payer 20 millions par an. Mais Mistral ne fait pas encore de bénéfices et donc ne peut vous distribuer de dividendes. Impossible, donc, de contribuer à la solidarité nationale ? Pas du tout, car de nombreuses solutions existent pour payer l’impôt plancher. Je propose une solution claire, juste et simple à mettre en œuvre : pour les cas limite comme le vôtre, l’impôt pourrait être payé en nature, c’est-à-dire en actions, si vous le souhaitez. Concrètement, au lieu de payer en cash, vous transféreriez 2 % de vos actions – soit 0,2 % du capital de Mistral — à la puissance publique. Si Mistral ne fait pas de bénéfices pendant 10 ans, votre part au capital de l’entreprise s’établirait, à l’issue de cette décennie, à 8 %. Tandis que la part de la puissance publique monterait de 2 %. Ces actions pourraient être mises dans un fond souverain : tous les Français bénéficieraient ainsi du succès de Mistral. Ou bien revendues à des salariés de l’entreprise, afin de les impliquer davantage — ce qui ne pourrait qu’être de nature à la renforcer. Dans tous les cas, aucun bouleversement. L’Etat – via la Banque Publique d’Investissement – est déjà au capital de Mistral. L’implication des salariés existe dans de nombreux pays européens parmi les plus productifs, comme les pays scandinaves.
J’ai enseigné de longues années à Berkeley en Californie et j’ai vu comment les patrons de la Sillicon Valley se sont progressivement trumpisés et libertarianisés, refusant la moindre solidarité avec le reste des américains, se déconnectant du reste de la société, s’arc-boutant sur leurs privilèges et leur ressentiment. La « French tech » compte-t-elle suivre cette pente là ? Ou va-t-elle décider de se tenir aux côtés de cette majorité de français qui réclament plus de justice fiscale et sociale ?
Pour ma part, je suis convaincu que les entrepreneurs français ont autre chose à dire, à proposer et à inventer que la simple imitation de Peter Thiel et Mark Zuckerberg. Un autre modèle fondé sur la coopération, la solidarité, la justice – et non la concurrence, le chacun pour soi et les privilèges. »
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